La "Bolita" : La loterie clandestine qui fait vibrer Cuba en pleine crise économique
Article publié le vendredi 18 avril 2025
Dans un pays où le salaire moyen plafonne à 42 dollars par mois, les Cubains s’accrochent à un espoir vieux comme la révolution : la "bolita", une loterie clandestine qui connaît un regain de popularité alors que l’île traverse sa pire crise économique depuis trois décennies. L’équipe de Tirage-Euromillions.net vous fait découvrir cette fascinante tradition qui défie les interdictions depuis 66 ans.
La "bolita" : un ticket d’espoir dans la tourmente économique
Imaginez un jeu si ancré dans la culture d’un pays que même 66 années d’interdiction n’ont pas réussi à l’éradiquer. C’est le cas de la "bolita" (littéralement "petite boule") à Cuba, cette loterie clandestine qui fait partie de l’ADN cubain et qui, selon Carlos, un "preneur de notes" interviewé par l’AFP, attire "plus de joueurs que jamais".
Et pour cause ! Avec des pénuries alimentaires chroniques, une inflation galopante et des coupures d’électricité quotidiennes, les Cubains cherchent désespérément une porte de sortie :
"Quand on sait que le salaire ne va pas suffire pour boucler la fin du mois, il ne reste plus qu’à s’en remettre à la chance", confie Carlos, qui collecte les paris depuis plus de 20 ans.
Comment fonctionne cette loterie de l’ombre ?
La "bolita" repose sur un système hiérarchique bien rodé :
- Les "preneurs de notes" : ce sont les visages du système, ceux qui recueillent les paris dans les rues
- Les "collecteurs" : ils centralisent les mises
- Les "banquiers" : ces mystérieux personnages gèrent les millions de pesos qui circulent chaque jour
📌 Le saviez-vous ?
En l’absence de tirage officiel à Cuba, la "bolita" s’appuie sur les résultats des loteries de Floride, de Géorgie ou de New York. Les résultats sont ensuite diffusés via internet, applications mobiles, Facebook ou WhatsApp.
Une tradition qui remonte au 19e siècle
La "bolita" n’est pas née d’hier ! Ce jeu est apparu à Cuba au 19e siècle, inspiré par les jeux d’argent introduits par les immigrants chinois et italiens. Il se joue avec des numéros de 1 à 100, chacun associé à un symbole particulier :
- 1️⃣ = un cheval
- 2️⃣ = un papillon
- Et ainsi de suite…
😂 Anecdote croustillante : Du temps de Fidel Castro, surnommé "Le Cheval", les Cubains qui avaient la chance d’apercevoir le leader révolutionnaire misaient immédiatement sur le numéro 1 ! Comme quoi, même les figures révolutionnaires peuvent involontairement alimenter les jeux qu’ils ont interdits.
Des gains qui changent des vies
Les sommes en jeu peuvent sembler modestes pour un Européen, mais elles sont potentiellement transformatrices à Cuba :
"Un bon numéro peut te changer la vie", s’enthousiasme Rogelio, 47 ans, qui raconte avoir gagné en deux semaines l’équivalent de 2 250 dollars – soit 61 fois son salaire mensuel d’employé d’État !
Mais tous ne connaissent pas cette chance. Rubén, 32 ans, traverse une mauvaise passe et s’amuse : "Les gens ne te disent même plus bonjour, ils te demandent quel numéro est sorti !"
De La Havane à Las Vegas : l’histoire méconnue des jeux à Cuba
Avant la révolution castriste de 1959, La Havane était connue comme la Mecque des jeux de hasard dans les Caraïbes. Les casinos fleurissaient, attirant des millions d’Américains et la mafia américaine y régnait en maître.
Les célèbres gangsters Meyer Lansky et Lucky Luciano, proches du dictateur Fulgencio Batista, rêvaient même de transformer le Malecón (la célèbre promenade havanaise) en une ribambelle d’hôtels-casinos. La révolution a mis fin à ces ambitions, propulsant indirectement Las Vegas comme capitale incontestée du jeu.
💡 Conséquence inattendue : L’interdiction des jeux à Cuba a directement contribué à l’essor fulgurant de Las Vegas, qui s’est retrouvée sans concurrence majeure dans la région !
Une passion qui défie la loi
Malgré des peines pouvant aller jusqu’à trois ans de prison et 300 000 pesos d’amende (environ 2 500 dollars), la "bolita" continue de prospérer. L’arrivée d’internet sur les téléphones mobiles en 2018 a même donné un second souffle à cette tradition.
Carlos résume parfaitement la situation : "La ‘bolita’ est dans l’ADN des Cubains et l’interdire n’a fait que la favoriser."
Une échappatoire dans la crise
Si la "bolita" connaît un tel succès aujourd’hui, c’est aussi parce qu’elle représente l’un des rares espoirs dans un contexte économique désespérant. Comme le souligne Carlos, la hausse du nombre de joueurs s’explique par le "désespoir" des Cubains face à la pire crise économique que connaît le pays depuis plus de 30 ans.
Cependant, cette passion n’est pas sans risque. Carlos reconnaît que "beaucoup de Cubains sont accros" et "s’endettent jusqu’à l’os" pour jouer, ajoutant une couche de précarité à une situation déjà difficile.
Dans cette île où l’espoir se fait rare, la "bolita" offre un petit frisson quotidien et la promesse, même infime, d’un avenir meilleur. Une preuve, s’il en fallait, que même les interdictions les plus strictes ne peuvent venir à bout des traditions profondément ancrées dans une culture.
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